Property Management – Le petit-déjeuner / débat des décideurs
Immobilier & Services, le 11 mars 2015
Le petit-déjeuner /débat des décideurs
Tous passionnés par leur métier et fins connaisseurs de l’immobilier, les property managers subissent une conjoncture difficile. Ouverts aux innovations, ils ont recruté des profils seniors et des compétences environnementales et techniques.., et ils ont investi dans des outils souvent coûteux. Dans ce débat, ils analysent ce marché de plus en plus concurrentiel…
Le bilan de 2014
De nombreux arbitrages, peu de gros appels d’offres, des prises de décision compliquées. Un marché stable malgré l’afflux des capitaux sur le marché français.
Patrice Cailly : L’année 2014 a été marquée par plusieurs phénomènes : de L’intensité du fait de nombreux arbitrages mais aussi beaucoup de cessions non abouties… Nous avons aussi constaté un turn over important chez nos clients et notamment chez les asset managers. Enfin, le retour de certains mandants internationaux se profile mais dans le même temps, il faut aussi constater, chez les clients français, un mouvement de ré-internalisation !
Jean-Philippe Pfertzel: L’année 2014 s’est caractérisée par un afflux de capitaux et, de ce point de vue, le marché de l’investissement a été bon. Mais nous devons faire le constat que ce volume d’investissements n’a pas été créateur de nouvelles richesses ! On ne créé rien de nouveau… Le marché du property management n’évolue pas.
Bertrand Coté : En effet, le marché a été assez calme avec un manque de gros appel d’offres qui auraient pu donner de l’intensité à notre secteur.
Aymeric Canivenc : Pour notre part, nous avons noté l’arrivée de nouveaux entrants sur le marché : principalement des nord-américains et des extrême-orientaux. Ces acteurs recomposent des portefeuilles au niveau de l’Europe et, de ce fait, sont à la recherche d’un pilotage au niveau paneuropéen.
Stéphane Bureau : 2014 a été une année d’arbitrage très forte, dans un contexte de prudence renforcée de la part des investisseurs. De ce fait, les étapes avant de signer un mandat se sont multipliées et, dans certains cas, nous constatons que les asset managers ont perdu la main dans la prise de décision au profit des fund managers qui sont de plus en plus présents au quotidien dans la gestion des actifs. Cette évolution est synonyme d’un surcroît de travail pour nos équipes alors même que le taux de transformation n’atteint généralement que 30 %… du fait, notamment, des accords-cadres qui existent.
Géraldine Ménard : Le second semestre 2014 a été particulièrement intense mais le taux de transformation s’est avéré réduit.
Jean-Claude Tanguy : S’il est vrai que les investisseurs internationaux sont présents en France, il faut rappeler que Londres reste et restera leur marché privilégié. Je partage le point de vue selon lequel les asset managers sont désormais concurrencés par les fund managers. Cela s’explique par la tension qui est forte sur le marché locatif, avec des effets de levier de plus en plus difficiles à trouver. Dans ce contexte, Le property manager reste un acteur clé dans La chaîne de valeur immobilière mais, dans le même temps, les mandants se posent des vraies questions lors du choix de leur prestataire car Leur problématique de fond, c’est bien de confier Leurs actifs à un prestataire qui sache créer de la valeur.
Gilles-Robert Pelloux : Le départ des fonds étrangers depuis quelques années a érodé le marché de la gestion locative. Les acteurs comme les SCPI, qui sont très actifs sur Le marché de l’investissement, sont structurés pour gérer en interne et ne sous-traitent pas. En revanche, nous constatons une hausse sur Les missions de gestion technique et de gestion des charges, notamment pour les actifs en régions.
Analyse de marché
Effet de ciseau, compression des marges dans un secteur déjà très concurrentiel…
Bertrand Coté : Pour analyser notre marché, regardons simplement les chiffres ! Le volume géré a cru de 35 % en 7 ans et le chiffre d’affaires a augmenté de 52 % mais, sur cette même période, le nombre de collaborateurs a enregistré une hausse de 75 % ! L’effet de ciseau est réel et, si on extrapole, on arrive à des marges négatives… Il faut avoir ces données en tête pour comprendre les difficultés auxquelles notre profession se trouve confrontée.
Aymeric Canivenc : Les acteurs de property management sont trop nombreux. De ce fait, certains sont à la recherche de chiffre d’affaires mais pas de rentabilité ! Une concentration sur ce marché serait incontestablement une bonne chose.
Patrice Cailly : Nous constatons parfois également des appels d’offres mal maîtrisés, avec une consultation beaucoup trop large mais qui, en même temps, illustre le fait que le client a besoin de se conforter dans ses choix. Cela alourdit la chaîne de décision et, globalement, cela représente du temps passé et donc un coût que les property managers doivent supporter.
Gilles-Robert Pelloux : Nous sommes souvent soumis à des contraintes de temps très fortes pour répondre à des appels d’offres mais, en revanche, les prises de décision sont très longues.
Stéphane Bureau : Nous constatons que l’effet de ciseau est de plus en plus fort. Nos clients nous ont poussés à recruter des profils senior et à nous entourer de compétences métiers. C’est effectivement ce que nous avons fait mais, aujourd’hui, il est difficile de les fidéliser alors qu’un bon collaborateur dans le property management, c’est une véritable mémoire vive des immeubles.
Jean-Philippe Pfertzel : Nous subissons en effet cet effet de ciseau avec une masse salariale à la hausse et, dans le même temps, nous sommes aussi confrontés à la difficulté de fidéliser nos collaborateurs ! Cela tient au niveau de rémunération dans nos sociétés mais également au fait du manque de considération de la part de certains clients.
Ré-internalisation
Une réalité constatée mais qui ne permet pas de parler d’une tendance lourde !
Géraldine Ménard : En effet, nous constatons et nous connaissons tous le cas de grands utilisateurs qui avaient externalisé auprès de property managers et qui, aujourd’hui, réinternalisent la couche de pilotage mais ils ont externalisé la partie comptable. Et pour certains, ce mouvement de ré-internalisation marque leur ambition de travailler, à terme, pour le compte de tiers !
Jean-Claude Tanguy : Les opérations de re-insourcing sont le fait essentiellement des foncières qui ont les compétences en interne.
Bertrand Coté : Le fait que certains de nos profils techniques soient recrutés par les investisseurs est un signe de cette ré-intemalisation. Pour ma part, je suis convaincu qu’en optant pour une gestion intégrée, le propriétaire se prive d’un regard extérieur sur ses actifs… un regard extérieur qui est aussi un regard panoramique sur un grand volume d’actifs, de typologie variée. Le property manager externe s’ouvre sur d’autres pratiques, à l’affût d’innovations de nature à renforcer sa productivité et à améliorer sa qualité de services.
Le FM, un concurrent ?
Bertrand Coté : Nous voyons certains investisseurs qui signent des contrats de prestations techniques avec des prestataires de facility management afin de déléguer de façon extrême le risque technique avec obligation de résultats. N’oublions pas que le prestataire de maintenance doit être piloté… IL faut bien faire la distinction entre la maintenance et la gestion technique immobilière !
Stéphane Bureau : Le property manager a une vision immobilière et globale de l’immeuble qui lui confère une légitimité pour accompagner les investisseurs dans la valorisation de leur actif.
Jean-Philippe Pfertzel : Pour notre part, nous constatons cette concurrence essentiellement sur des actifs logistiques.
Patrice Cailly : Cette concurrence ne représente qu’une micro part de marché. Quant aux investisseurs qui ont signé des contrats de prestations techniques, cela ne les a pas empêchés de signer avec un property manager. Nous sommes également concurrencés par des opérateurs d’AMO et de contractants qui sont de plus en plus nombreux sur le marché, par des consultants indépendants…
Aymeric Canivenc : Par rapport à cette concurrence, nous devons nous poser la question de savoir qui nous prend des marchés et pourquoi. Et surtout, nous devons nous interroger sur notre positionnement dans la chaîne de valeur. C’est à nous de défendre l’idée que nous pouvons apporter plus de compétences, plus de services si le client le demande. Et, à partir de ce moment-là, nous ne sommes plus en concurrence !
Vers un panel d’offres ?
Du property basique ou du haut de gamme ? Segmenter l’offre : possible ou utopique ?
Bertrand Coté : Proposer plusieurs offres avec différents niveaux de prix dans notre métier ne me paraît pas être la solution ! Inévitablement, les clients voudront la meilleure prestation pour le prix de l’offre basique.
Aymeric Canivenc : il faut que le service que l’on rend soit facturé au vrai coût. Sur le sujet des prix, nous avons un devoir de vérité pour pérenniser notre métier. Pour notre part, nous proposons au client un panel d’offres et nous calons avec lui les services qui répondent à son attente.
Comment retrouver de la croissance ?
Services additionnels, diversification de clientèle…
Patrice Cailly : En effet, les marges se font sur les services additionnels et sur les travaux. Pour retrouver de la valeur ajoutée, il faut remonter un peu plus vers l’asset management mais, selon les mandants, ce n’est pas toujours possible.
Géraldine Ménard : On peut aussi miser sur certains acteurs qui reconfigurent leur activité : je pense notamment à SCC qui, en juin 2015, doit se retirerdes mandats de syndic pour les biens dont il n’est plus propriétaire.
Bertrand Coté : Pour ma part, je continue à penser que les structures publiques et para-publiques constituent un segment de clientèle qui recèle un très gros potentiel. De ce point de vue, il faut déplorer le manque d’intérêt des collectivités territoriales pour l’amélioration de leur gestion immobilière alors que les enjeux sont énormes pour les finances publiques.
Jean-Claude Tanguy : Aujourd’hui, le property management est face à un challenge qu’il doit remporter : il doit livrer et gagner la bataille de la connectivité. Nous sommes les seuls capables d’agréger les données de l’immeuble : géolocalisation, loyer, charges et qualité intrinsèque de l’actif. Si nous relevons ce défi, nous apporterons du plus sur les aspects locatifs et à l’investisseur. C’est un point de différenciation qu’il nous faut exploiter.
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