Immobilier coté : des petites foncières ambitieuses à mettre en portefeuille

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eric duval lerevenu foncière immobilière

Les prix de l’immobilier commercial et de bureaux sont au plus-haut à Paris. Mais on peut miser sur les foncières dirigées par des entrepreneurs.

Altarea Cogedim a regonflé son portefeuille de projets : 51 000 m2 sont en construction à Toulon-La Valette. (ALTAREA COGEDIM)

Altarea Cogedim : sur tous les fronts

L’homme incarne l’essence de l’entrepreneur patron de foncière, capable de conjuguer vision de long terme, prudence mais aussi prises de risque, même si elles ne sont pas toujours couronnées de succès. Alain Taravella a débuté sa carrière avec Gérard Brémond, autre figure de l’immobilier français, avec lequel il lance Pierre & ; Vacances (voir le cours) . Il sera le directeur général durant dix ans.

C’est en 1994 qu’il crée Altarea avec Jacques Nicolet. La société grandit, rachète des actifs délaissés par d’autres, investit dans les centres commer-ciaux et les bureaux.

Jusqu’à ce coup d’éclat de 2007, quand il reprend Cogedim (voir le cours) . Cette irruption dans la promotion de logements haut de gamme sera suivie en 2012 du rachat de Rueducommerce. Le groupe se voit dès lors en «foncière multicanal». Un concept qui traduit la volonté de la société d’embrasser toutes les mutations du commerce. Un enjeu de taille alors que son portefeuille d’immobilier commercial, en recentrage sur les grands actifs, pèse 4,3 milliards d’euros, dont 2,5 milliards en propre.

10 euros de dividende. À 66 ans, Alain Taravella, qui contrôle 46,1% du capital, inscrit son action dans la durée. Au nom de la pérennité du groupe, une nouvelle gouvernance vient d’être mise en place avec trois directeurs généraux délégués. De plus, les derniers mois ont été mis à profit pour renforcer la structure financière, notamment grâce à un partenariat avec Allianz. Si Altarea Cogedim insiste aujourd’hui sur ses 3,1 milliards d’euros de projets en portefeuille, dont 1,8 milliard pour le seul immobilier commercial, c’est en partie en raison d’une conjoncture morose.

Deux années de vaches maigres, avec des résultats tirés de l’exploitation sous pression. Mais la promesse aux actionnaires est intacte : à compter de 2017, actifs et flux des opérations seront en nette hausse. D’ici là, le dividende sera maintenu à 10 euros par action. À la clé, un rendement de 7,5% bien convaincant. De quoi rester positif sur une action valorisée sans excès.

Eurosic : le retour de la famille Ruggieri

Jusqu’ici dans l’ombre, Eurosic (voir le cours) a toutes les chances d’accrocher à nouveau la lumière boursière. Détenue par BPCE jusqu’en 2011, la foncière est alors rachetée par Charles Ruggieri, via le holding familial Batipart. Ce Lorrain de 66 ans fait partie des professionnels respectés de l’immobilier français.

À l’origine de Foncière des Régions, qu’il avait fondée dans les années 80, il a toujours privilégié le dévelop-pement de la société plus que le maintien de son contrôle sur le capital. En 2010, il cède sa participation, laissant l’italien Leonardo Del Vecchio seul actionnaire de référence. Aujourd’hui secondé par son fils Nicolas, directeur général délégué, et Yan Perchet, PDG, Charles Ruggieri va-t-il rééditer la performance en hissant Eurosic parmi les premières foncières françaises de bureaux ? L’ambition ne manque pas, comme en témoi- gne le rachat de Siic de Paris à Realia et SFL pour 1,5 milliard d’euros.

Ménage dans les actifs. La méthode pour grandir repose avant tout sur la rotation des actifs. Travailler les portefeuilles pour en extraire de la valeur et garantir un «rendement satisfaisant» aux actionnaires. Comprenez au moins 6% dans la durée.

Eurosic revendique ainsi la cession de la moitié de son portefeuille initial (environ 800 millions d’euros) en trois ans, tout en ayant réinvesti 750 millions dans de nouveaux actifs et projets. Le groupe va rééditer la manœuvre avec Siic de Paris. Si la promesse est alléchante, il n’est pas simple d’en profiter. Face aux 38,3% de Batipart, trois assureurs – Predica, Covea et les ACM – sont actionnaires fidèles et assèchent le flottant, réduit à 2%.

En trois ans, ils ont souscrit aux deux augmentations de capital de la foncière. Toutefois, même si l’opération Siic de Paris (voir le cours) dégradera à court terme le rendement, on peut se placer en prenant en compte cette contrainte pour s’inscrire dans la durée. Nul doute que la foncière saisira d’autres occasions de croissance externe, peut-être en Europe. L’occasion alors d’élargir le flottant.

Patrimoine & Commerce : très ambitieux

Patrimoine & Commerce (voir le cours) ne cache pas ses ambitions : s’affirmer comme le spécialiste français des parcs commerciaux low cost. Détenue à 30% par la famille Duval, la foncière ne pèse pourtant qu’une faible part de l’empire immobilier familial.

Développé par Éric Duval, un homme d’affaires breton qui figure parmi les cent premières fortunes de France, Groupe Financière Duval détient un important patrimoine immobilier, mais aussi de tourisme et de loisirs. Sa filiale Odalys revendique le rang de numéro deux du résidentiel de tourisme en France et en Europe.

Doubler de taille d’ici à 2016. Cotée depuis 2009, Patrimoine & Commerce détient un patrimoine de 501 millions d’euros à fin 2013. Elle vise 1 milliard d’euros d’ici à fin 2016. Un doublement qui passera par de la croissance externe, comme en 2013 où elle a avalé Foncière Sepric. La récente augmentation de capital de 47 millions réservée à Predica, l’assureur vie de Crédit Agricole (voir le cours), témoigne d’une réelle faim de croissance.

Et de la volonté de l’actionnaire principal de se laisser diluer pour atteindre cet objectif. Pour l’heure, l’action, proche de son plus-haut historique, a effacé la décote sur l’ANR. Avec une dette essentiellement amortissable, la société paraît capable de profiter de taux plus favorables.

Mais, à court terme, malgré l’engagement d’améliorer la distribution des résultats, l’action nous semble correctement valorisée.

Frey : des loyers faibles en périphérie des villes

Lorsqu’il prend les commandes de l’entreprise de son oncle en 2006, Antoine Frey, aujourd’hui âgé de 40 ans, a une conviction : les zones commerciales périurbaines sont à la veille d’une nouvelle jeunesse si l’on sait renouveler l’offre. Fini les hangars, place aux zones «vertes» et attrayantes.

Avec un argument qui fait mouche auprès des commerçants : un loyer plus faible (environ 120 euros le mètre carré) et des charges inférieures aux centres commerciaux qui prélèvent une part importante du chiffre d’affaires (taux d’effort). Tout en garantissant de bons rendements.

1 milliard d’euros en 2020. Tirer profit de ce marché passe par la transformation en foncière. Pas question pour Antoine Frey (44,2% du capital) de se limiter à l’activité historique de promotion. Les actifs construits – ou transformés grâce aux délégations accordées par les villes – seront conservés, soit en totalité, soit partiellement via un fonds détenu avec Predica et Ageas.

Si la foncière détient déjà un patrimoine de 300 millions d’euros, atteindre le milliard en 2020 ne paraît pas hors de portée. Mais pour atteindre un tel objectif, Frey (voir le cours) devra sans doute passer par des acquisitions même si, à partir de 2016, la croissance va s’accélérer avec la livraison des projets en cours.

Le profil de rendement, aujourd’hui modeste, s’affirmera alors crescendo.

Argan : le spécialiste de la logistique

Mission presque accomplie pour Argan. Riche d’un patrimoine de 1,3 million de m2, occupé à 98%, la foncière s’est fait un nom sur le terrain de la logistique et s’apprête à tenir les objectifs de son plan 2015 : contrôler un portefeuille d’un milliard d’euros pour 70 millions de loyers annuels.

Après avoir démarré dans l’industrie, son fondateur, Jean-Claude Le Lan, a bâti une foncière composée d’actifs haut de gamme, respectueux des normes environnementales, avec des locataires solides. Et une obsession : anticiper les attentes de ses clients, entreprises et logisticiens. «Il n’y a pas de réserve de valeur dans la logistique, constate le président d’Argan, à la tête d’une équipe légère d’une douzaine de personnes. Ce qui impose d’être actif dans la gestion du portefeuille.»

Le temps des moissons. Jusqu’ici axée sur la croissance, la foncière va entrer dans une phase de maturité. Au-delà de 2015, les investissements pourraient revenir vers 60 millions par an. Avec, à la clé, un profil de rendement plus affirmé. À la faveur de la réduction du levier d’endettement, qui pourrait revenir vers 60% du patrimoine, Argan (voir le cours) verrait une amélioration de 7 à 8% l’an de son actif net réévalué par action. De quoi alimenter un cours bien valorisé à brève échéance.

Terreis : la cagnotte immobilière de Jacky Lorenzetti

Pour les amateurs de rugby, Jacky Lorenzetti est l’ambitieux président du club Metro Racing 92, candidat au bouclier de Brennus dans le Top 14. Mais peu connaissent l’homme d’affaires qui figure parmi les premières fortunes de France.

Après la revente en 2007 à prix d’or de Foncia, société d’administration de biens qu’il avait créée en 1972, il gère avec efficacité son patrimoine composé d’actifs financiers et immobiliers, mais aussi vinicoles et de loisirs.

Face à la fièvre des prix. Ovalto, son holding familial, détient ainsi 56% de la foncière Terreis. Dotée d’un patrimoine de 1,5 milliard d’euros, cette société mène ses investissements avec une logique patrimoniale dans les bureaux parisiens, surtout dans le quartier central des affaires. Objectif : 2 milliards d’euros de bureaux à terme.

L’envolée de 30 à 40% des prix depuis 2011 complique l’équation. Terreis (voir le cours) veut geler jusqu’à nouvel ordre toute acquisition. Un frein au potentiel du titre? Pas forcément. Avec 50% d’endettement, composé d’emprunts amortissables, remboursés au rythme annuel de 50 millions, l’ANR par action progressera de 2 euros par an, même en l’absence de tout nouvel achat. Mais en servant un dividende en hausse.

Lionel Garnier

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